Cour de Cassation
Chambre sociale
Audience publique du 10 mai 2006 Cassation.
N° de pourvoi : 05-42210
Publié au bulletin
Président : Mme Mazars, conseiller le plus ancien faisant fonction.
Rapporteur : M. Gosselin.
Avocat général : M. Foerst.
Avocats : Me Ricard, Me Cossa.
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles 1134 du Code civil et L. 120-4 du Code du travail ;
Attendu que Mlle X... a été engagée le 15 octobre 1991 en qualité d'inventoriste par la société Gecoma ; que ses fonctions exigeant de se rendre, en équipe, de très bonne heure le matin, sans pouvoir utiliser les transports en commun, hors de la région parisienne, pour faire des inventaires de magasins pour des sociétés clientes, sa chef d'équipe venait la chercher à son domicile, avec la navette de l'entreprise;
qu'en novembre 2001, l'employeur a cessé cette "pratique"; que, soutenant qu'elle était mise dans l'impossibilité de travailler, Mlle X... a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation du contrat de travail et sollicité la condamnation de l'employeur à lui payer diverses sommes ;
Attendu que pour débouter la salariée de ses demandes la cour d'appel retient que la société n'avait jamais pris l'engagement d'assurer le transport de la salariée de son domicile au lieu de travail, que l'existence d'un usage n'était pas établie et que l'existence d'une note de service prévoyant "qu'à compter du 1er septembre 1999 il n' y aurait plus de ramassage du personnel ni de dépôt à domicile" était dépourvue de portée ;
Attendu, cependant, que le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que l'employeur, prenant en compte la spécificité de son travail d'inventoriste en équipe et l'horaire exceptionnel de prise du travail, faisait prendre la salariée depuis plus de dix ans à son domicile par un véhicule de l'entreprise et, cessant de la faire bénéficier de cet avantage lié à sa fonction, l'avait mise dans l'impossibilité de travailler, ce qui caractérisait un manquement de l'employeur à l'exécution de bonne foi du contrat de travail, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 septembre 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne la société Gecoma aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Gecoma à payer à Me Ricard la somme de 2 000 euros et donne acte à ce dernier qu'il renonce à percevoir la contribution de l'Etat ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix mai deux mille six.