Cour de Cassation
Chambre sociale
Audience publique du 13 décembre 2006
N° de pourvoi : 05-43481
Inédit
Président : M. CHAGNY conseiller
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé, le 1er janvier 1976, par la société Pauporte en qualité de représentant, a, le 9 juillet 2001, pris acte de la rupture de son contrat de travail en invoquant le comportement fautif de son employeur ; que celui-ci a, par courrier du 24 juillet 2001 licencié le salarié pour faute lourde ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal du salarié, pris en ses quatre premières branches :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt d'avoir requalifié la rupture en démission et de l'avoir débouté de ses demandes à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de rappel de commissions, alors, selon le moyen :
1 / qu'une pratique n'acquiert la valeur d'un usage que si elle est constante, générale et fixe ; qu'en retenant l'existence d'un usage en vertu duquel les commissions n'étaient acquises aux représentants qu'après encaissement effectif, sans rechercher si cette pratique présentait les critères de constance, de généralité et de fixité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 121-1 et L. 751-1 du code du travail ;
2 / que le droit à commission naît de l'acceptation par l'employeur de la commande transmise par le représentant, sauf convention ou usage d'entreprise contraires ; que l'existence d'une convention ou d'un usage d'entreprise contraires, ne saurait résulter des contrats de travail d'autres salariés de la société ; qu'en se fondant dès lors sur la production de contrats de travail d'autres salariés de la société Pauporte pour juger que les retenues opérées sur les commissions de M. X... étaient conformes aux liens contractuels et usages de l'entreprise, la cour d'appel a violé les articles L. 121-1 et L. 751-1 du code du travail et 1134 du code civil ;
3 / qu'en retenant qu'il résultait du courrier du 9 janvier 2002, que M. X... avait expressément fait référence à un usage d'entreprise autorisant le paiement des commissions après encaissement, la cour d'appel a dénaturé ledit courrier et violé l'article 1134 du code civil ;
4 / que l'écrit par lequel le salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur ne fixe pas les limites du litige ; que le juge est tenu d'examiner les manquements de l'employeur invoqués devant lui par le salarié, même si celui-ci ne les a pas mentionnés dans cet écrit; que dans ses conclusions, M. X... a reproché à l'employeur d'avoir commis multiples défaillances vis-à-vis des clients (retards de livraisons, baisse de qualité des produits), l'empêchant d'exercer normalement ses fonctions ; qu'en s'abstenant d'examiner le bien fondé de ces reproches, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-4, L. 122-13, L. 122-14-3 et L. 751-1 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, procédant à l'interprétation nécessaire, exclusive de dénaturation, du courrier du 9 janvier 2002, en retenant que le salarié avait fait expressément référence à l'usage selon lequel les commissions ne sont acquises au représentant qu'après encaissement effectif, c'est-à-dire après déduction des avoirs, escomptes et impayés, a, sans avoir à procéder à des recherches qui ne lui étaient pas demandées, examiné les manquements, estimés non fondés, invoqués par le salarié en ses conclusions et a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en sa cinquième branche :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le second moyen du pourvoi incident de l'employeur :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le premier moyen du pourvoi incident :
Vu les articles L. 122-4 et L. 122-5 du code du travail ;
Attendu que pour débouter l'employeur de sa demande en paiement d'une somme à titre de préavis de démission, l'arrêt retient, par motifs adoptés, que la société Pauporte, tout en demandant trois mois de préavis non effectué, licencie M. X... pour faute lourde ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que la rupture du contrat de travail était intervenue le 9 juillet 2001 par l'effet de la prise d'acte du salarié et décidé que cette rupture produisait les effets d'une démission, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté l'employeur de sa demande à titre de préavis, l'arrêt rendu le 8 mars 2005, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize décembre deux mille six.